« Tan lejos de Dios, tan cerca de los Estados Unidos »
Alfonso Cuarón, les Aztèques, la Tequila, le Sombrero : le Mexique et ses merveilles ne semblent avoir de secret pour personne. « Pour un bon guacamole, il faut rajouter un shot de tequila dedans : un délice ! » vous expliquera Xavier, designer freelance de 36 ans qui aura passé 2 semaines en Amérique Latine en 2004. Après avoir vu « Amores Perros » d’Alejandro Iñarritu, il vous servira également un de ses monologues dont il a le secret, prétendant avoir compris les aspirations, ambitions et messages du cinéma mexicain. Mais qu’est-ce qu’il y connaît vraiment ? A priori, autant que moi : pas grand-chose !
S’il était nécessaire que je le réalise, la Masterclass donnée dimanche soir par le fantasque réalisateur Guillermo del Toro, organisée par le Festival International de Films de Fribourg et modérée par Frédéric Maire, directeur de la cinémathèque suisse, a remis, en un peu plus d’une heure, l’église au milieu du village. En duplex d’Hollywood, où il termine la postproduction de son dernier film, l’homme derrière la caméra de chefs d’œuvres tels que « La Forme de l’Eau » ou « Le Labyrinthe de Pan » a délivré un cours magistral sur l’histoire si méconnue du cinéma mexicain. Lui et ses congénères, comme Alfonso Cuarón, ont grandi dans un univers de mixité culturel que la mondialisation et la démocratisation de la télévision ont aidé à promouvoir : des dessins-animés japonais, des films de guerre américains, la publicité à outrance ou encore les comics. Ainsi, ces influences multiples se retrouvent au sein de chaque long-métrage comme tout au long de sa filmographie, passant de « Hellboy » à « La Forme de l’Eau », avec un détour par « Pacific Rim ». Ce dernier est d’ailleurs l’exemple parfait de la relation étroite que le cinéma mexicain a toujours entretenue avec Hollywood. Comme son prédécesseur Roberto Gavaldón, Guillermo del Toro a souvent collaboré avec le pays voisin. Comme dit l’adage mexicain, « Tan lejos de Dios, tan cerca de los Estados Unidos » (« Si loin de Dieu, si proche des Etats-Unis »).
« Au Mexique, le mélodrame est toujours très brutal et sauvage » confiait del Toro. Dès lors, ce n’est pas la sensation coup-de-poing de cette année,
« New Order », qui lui donnera tort. Réalisé par Michel Franco et sorti en 2020, le film nous plonge, tout du moins au début, dans les paillettes et faux-semblants de la haute société mexicaine. C’est au cœur d’un mariage huppé que fait irruption la révolution, portée par les victimes de l’inégalité sociale. Pas de demi-mesure, pas de discours larmoyant sur les regrets des aisés lorsqu’un flingue leur est posé sur la tempe, pas d’échanges de bons procédés. Dans ce futur proche et dystopique, Michel Franco ne fait pas de prisonniers. Ou, tout du moins, pas pour longtemps.
Si sa violence peut déranger, elle est néanmoins le reflet sauvage et animal d’une colère totalement humaine. Peut-être que ce qui fait le plus peur, ce n’est pas le bruit des balles ou la brutalité de certaines scènes, mais bien l’écho réaliste qu’il fait résonner en nous, celui qui ne demande ni comment ni où, mais quand. Un style direct et sobre sert merveilleusement le propos, où la violence des mots, des interactions et des postures heurtent autant que n’importe quelle arme à feu. Rien n’est subtil, tout est clair et transparent : nous montrer tout ce qu’on est capable de faire au nom du sacrosaint dollar.
Ce discours, c’est également celui qui transpire du moyen-métrage de Rubén Gámez, « La Fórmula Secreta », réalisé en 1965. Remportant plusieurs prix lors d’un concours de cinéma expérimental cette même année, il ne laisse indubitablement personne indemne. S’il est difficile d’en sortir un véritable fil conducteur (si ce n’est les bouteilles de Coca-Cola qui surgissent en contre-jour à plusieurs reprises), le film aborde, à nouveau sans subtilité mais à l’aide de métaphores, de plans chocs et de musiques judicieusement choisies, la condition sociale mexicaine. Comment traiter d’une telle œuvre lorsque même Alfonso Cuarón déclarait, en 2017, que « si l’on devait résumer le film, ce serait l’histoire d’un patient mourant qui reçoit une transfusion de Coca-Cola » ? Si, je sais : regardez-le !
Le cinéma mexicain s’est nourri des nombreuses cavalcades de l’Histoire : leur XXe siècle, marqué par un bouleversement radical avec l’époque précédente et qui tantôt effraie, tantôt fascine; le Franquisme, qui a poussé des artistes comme Buñuel à s’expatrier et continuer leur œuvre de l’autre côté de l’Atlantique; la proximité avec Hollywood; l’arrivée des comics, mangas et dessins-animés japonais, etc. Ce sont toutes ces influences, portées par des réalisateurs excentriques et créatifs, qui ont façonné le cinéma mexicain que le FIFF nous a merveilleusement proposé de découvrir cette année. Et vraiment, on ne s’en lasse pas.
David
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Chère belle-maman,
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Tout juste sorti.es des Teintureries, trois comédien.nes émergent.es, Aline Bonvin, Philippe Annoni et Jérémie Nicolet, se sont produit.es à Friscènes le 9 octobre. Leur spectacle Playlist a été sélectionné dans le cadre du Prix de la Relève suisse romande et créé spécialement pour le festival. Retour sur un spectacle musical.
Le public entre. Sur scène, un piano, un bocal plein de billes : c’est tout. Ils sont trois, deux comédiens et une comédienne, vêtu.es de combinaisons semblables – l’un rouge, l’autre vert, la troisième bleue – en plein échauffement à vue. Les articulations craquent. Ça discute.
« – Quelle musique pour la fin du monde ?
– Sparkles, de Radwimps ! »
Ils jouent au « jeu de la musique ». L’un pose une question, les deux autres doivent répondre. Quelle musique pour ton enterrement ? Et pour ton mariage ? Et pour ton meilleur petit-déjeuner ? On débat, on se contredit et parfois on se retrouve. Le trio s’amuse, chauffe sa voix ; bruit de fond tandis que les gradins se remplissent. Puis le public se tait, et alors c’est le show : à fond la musique, les lumières multicolores et les chorégraphies.
L’idée est venue d’une musique en particulier, une musique qui en a amené une autre, puis une autre, et ainsi de suite… une Playlist autour de laquelle le spectacle s’est construit. On nous emmène, de manière frénétique, au travers des classiques de la chanson françaises, de J-Pop et des tubes iconiques des années 2000. Les comédien.es évoluent sur scène avec folie, dansent, lancent musique après musique, évoquent les rêves qui les relient et les émotions qui les remuent – avec en fil rouge, leurs souvenirs.
Car Playlist parle bien de ça, de musique et d’émotion. D’une musique qui peut, dans ses paroles et sa mélodie, faire écho en chacun de nous. Un écho qui rebondit différemment, qui mue et se construit, une réponse plurielle au départ d’un même son. Cette richesse, ils l’explorent, jouent avec et sollicitent même le public : si votre plus grand amour revenait, après que vous ayiez tiré un trait et continué votre route, s’il était là, sur votre pallier, et qu’il vous disait avoir tout quitté pour vous… quelle musique auriez-vous en tête ?
On est presque déçu que le spectacle ne dure pas plus longtemps, mais c’est que le jeu avec le public est intelligemment mené et le temps passe vite. Playlist est un spectacle drôle et touchant, qui provoque le rire et, l’air de rien, tout à la fin, nous touche en douceur. Une musique parle de tout, des moments de joie comme de tristesse ; elle peut évoquer le passé, les erreurs, les regrets. Les moments sombres qui, d’une manière ou d’une autre, nous ramèneront à ce qui nous rend humains, sans pour autant nous enlever l’espoir. Et ça, Playlist le retranscrit bien.
Retrouvez Aline Bonvin, Philippe Annoni et Jérémie Nicolet sur leurs réseaux.
Le résumé donné par Friscènes, c’est ici.
Il n’y a pas de prochaine date connue pour ce spectacle. L’actualité des comédiens et la poursuite de ce spectacle est à suivre.
Amélie Gyger
Alors on danse ?
C’est fini… c’est déjà fini… c’est peut-être fini, c’est May B !
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A force de déambuler, je me suis à nouveau retrouvé au théâtre ! C’était jeudi 31 mars à Nuithonie pour assister à une double représentation.
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