Le cinéma, c’était mieux en 1920 !
Parce que les films en 2020, c’était pas folichon
Vous n’êtes plus allé.e au cinéma depuis bientôt six mois, n’est-ce pas ? Et vous commencez tranquillement à désespérer, seul.e, devant l’écran de votre ordinateur ou de votre télévision, à revoir pour la cinquième fois le même opus de cette merveilleuse trilogie que vous aimiez tant à l’adolescence, mais qui aujourd’hui vous parait tristement attendu et vidé de toute sa magie d’antan ? Netflix devient un labyrinthe fait de courants d’air, les sites de streaming ne vous proposent plus que des nanars, et, avouez-le, vous en avez un peu marre de regarder des absurdités sur Chérie 25 ?
Je vous comprends, cher ou chère lecteur.trice, moi aussi, je me lasse doucement, mais surement des enquêtes improbables des chaines à petit budget, où la voix off nous offre une ambiance de suspens digne d’un mauvais film d’horreur, et cela sans compter le fait que chaque annonce de report du prochain long-métrage d’Alexandre Astier me blesse comme un méchant coup au sternum.

Cependant, pour palier à l’ennui des émissions déjà vues et des grandes productions aux intrigues simplistes, que diriez-vous de faire avec moi un bond dans le passé ? Non, pas le « passé » des années 70 ou 80, nous connaissons tous et toutes trop bien les répliques de Stallone et de Jean-Claude Dusse pour nous replonger dans ces films encore une fois.
Allons, faites-moi confiance, inversons le cours du temps : direction l’entre-deux-guerres, et comme il y a des coupons de réduction pour les séances cette semaine, ce n’est pas un, mais deux films que nous allons regarder aujourd’hui.
Quoi, vous n’êtes pas convaincu.e par le cinéma en noir et blanc ? Ah bon… vous savez, sur un malentendu, ça peut marcher !
Un chien andalou – Luis Buñuel, Salvador Dali – 1929.

Le premier film que nous allons voir est Un chien andalou de Luis Buñuel et de Salvador Dali (mais oui, le type avec les longues moustaches qui dessine des horloges). Le second, c’est Le cabinet du Docteur Caligari, dont les décors sont peints dans un style purement expressionniste.
Bon, je vous préviens — après tout, nous ne sommes jamais assez prudent.e avec ce genre de chose — vous pourriez bien être quelque peu dérouté.e une fois la séance démarrée. Alors, certes, non, ce n’est pas une intrigue aussi tarabiscotée que dans le dernier Nolan où la moitié de la planète s’efforce de retracer le schéma narratif du film, mais vous devrez tout de même, à choix, faire un léger effort de concentration ou vous laisser bercer par les images.
Tentons tout d’abord une petite analyse, sans rien divulgâcher, cela va de soi. La projection ne dure qu’une vingtaine de minutes, ce qui devrait largement vous laisser de la place dans la cervelle pour le second film. Il est en noir et blanc, comme presque toutes les réalisations de l’époque, et est entièrement muet. Non, ne rallez pas, s’il vous plait : moins de dialogues, c’est plus d’espace pour la musique.

L’intérêt de l’œuvre réside en son accumulation de petits détails qui en fait un pur produit surréaliste — après tout, Dali était dans le coup. Vous verrez donc beaucoup de fourmis, des pianos, des couples amoureux ou en crise et pas mal de cadavres.
Le court-métrage propose un enchainement de scènes qui ne semblent avoir aucun sens, mais qui pourtant sont reliées par des éléments récurrents formant un fil rouge qui nous guide à travers l’imaginaire. Composé selon un principe semblable à celui de l’écriture automatique, la toile de l’écran se transforme en une porte vers un univers onirique et, lorsque le projecteur s’éteint, l’impression d’avoir visualisé un rêve étrange s’impose dans nos esprits.
Le cabinet du Docteur Caligari – Robert Wiene – 1922
La deuxième œuvre est un mélange entre le thriller et le film d’horreur. Bon, rassurez-vous, âmes sensibles, personne ici ne descendra les escaliers la tête retournée, tout en vous suggérant (en sumérien) de renouer avec le complexe d’Œdipe qui avait disparu de votre psyché une fois l’enfance finie.
Vous n’êtes pas apaisé.e ? Laissez-moi au moins une chance de vous convaincre avec un petit résumé.

En 1920, le réalisateur allemand Robert Wiene présente à son public une étrange œuvre à l’esthétique plus que novatrice. Le film vous emmènera d’abord dans un jardin où deux hommes, assis sur un banc, discutent. Soudain, une femme vêtue de blanc, mais dont le maquillage des yeux rappelle à notre mémoire les heures les plus sombres d’Avril Lavigne apparait. C’est la fiancée d’un des deux individus, et celui-ci propose à son compère de lui raconter comment la jeune fille est devenue émo si austère. L’histoire fait un bond dans le passé. Un village sans nom, dont les maisons sont faites en peinture et où aucun mur n’est droit, voit une fête foraine s’installer. Francis, notre narrateur, décide de s’y rendre avec son ami, mais c’est alors que les lieux commencent à connaitre des événements étranges. Le Docteur Caligari, un homme plutôt âgé et singulier présentant à la foule un somnambule sous son chapiteau, pourrait être lié aux crimes sordides qui ont secoué la bourgade.

Alors ? Oui, j’admets que dit comme cela, la résolution de l’affaire semble prévisible, mais c’est un chef-d’œuvre, pas un épisode de Mimi Mathy, vous pourriez être surpris. e. Et puis, nous n’allons pas regarder ce film pour son scénario voyons, mais pour l’esthétique qu’il propose !
En effet, l’expressionnisme allemand est partout dans ce film. Tout d’abord, les traits des personnages, marqués et soulignés de noir, mais aussi les décors. Les rues, les maisons et les pavés sont des fresques biscornues où chaque élément semble se pencher dangereusement en direction des acteur.trice.s. Mais la scénographie ne fait pas tout : cette œuvre ressemble à un conte gothique où la violence et les émotions fortes sont au cœur de l’intrigue.
De plus, et si Le journal d’un fou de Gogol ne vous est pas inconnu, vous comprendrez vite que ce que le narrateur présente n’est qu’une version de sa réalité, et sans pour autant être un casse-tête de mises en abime et de révélations à la Matrix, le film aborde une certaine idée très intéressante de la perception du monde qui nous entoure.

Vous voilà convaincu.e ? Parfait ! Les deux productions cumulées ne nous prenant qu’une heure et demie de notre temps, nous aurons peut-être même encore un moment de libre pour voir un épisode d’une série Netflix avant d’aller nous coucher.
Ah oui… j’oubliais. Munissez-vous ne n’importe quel objet molletonneux et rassurant avant de lancer le film. Il n’y a pas de screamers, mais certaines scènes sont pour le moins… enfin… vous comprenez ?

Anouck
PS : Cliquez sur les hyperliens des titres. Youtube vous emmènera au cinéma sans débourser un centime.


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Tout juste sorti.es des Teintureries, trois comédien.nes émergent.es, Aline Bonvin, Philippe Annoni et Jérémie Nicolet, se sont produit.es à Friscènes le 9 octobre. Leur spectacle Playlist a été sélectionné dans le cadre du Prix de la Relève suisse romande et créé spécialement pour le festival. Retour sur un spectacle musical.

Le public entre. Sur scène, un piano, un bocal plein de billes : c’est tout. Ils sont trois, deux comédiens et une comédienne, vêtu.es de combinaisons semblables – l’un rouge, l’autre vert, la troisième bleue – en plein échauffement à vue. Les articulations craquent. Ça discute.
« – Quelle musique pour la fin du monde ?
– Sparkles, de Radwimps ! »
Ils jouent au « jeu de la musique ». L’un pose une question, les deux autres doivent répondre. Quelle musique pour ton enterrement ? Et pour ton mariage ? Et pour ton meilleur petit-déjeuner ? On débat, on se contredit et parfois on se retrouve. Le trio s’amuse, chauffe sa voix ; bruit de fond tandis que les gradins se remplissent. Puis le public se tait, et alors c’est le show : à fond la musique, les lumières multicolores et les chorégraphies.

L’idée est venue d’une musique en particulier, une musique qui en a amené une autre, puis une autre, et ainsi de suite… une Playlist autour de laquelle le spectacle s’est construit. On nous emmène, de manière frénétique, au travers des classiques de la chanson françaises, de J-Pop et des tubes iconiques des années 2000. Les comédien.es évoluent sur scène avec folie, dansent, lancent musique après musique, évoquent les rêves qui les relient et les émotions qui les remuent – avec en fil rouge, leurs souvenirs.
Car Playlist parle bien de ça, de musique et d’émotion. D’une musique qui peut, dans ses paroles et sa mélodie, faire écho en chacun de nous. Un écho qui rebondit différemment, qui mue et se construit, une réponse plurielle au départ d’un même son. Cette richesse, ils l’explorent, jouent avec et sollicitent même le public : si votre plus grand amour revenait, après que vous ayiez tiré un trait et continué votre route, s’il était là, sur votre pallier, et qu’il vous disait avoir tout quitté pour vous… quelle musique auriez-vous en tête ?

On est presque déçu que le spectacle ne dure pas plus longtemps, mais c’est que le jeu avec le public est intelligemment mené et le temps passe vite. Playlist est un spectacle drôle et touchant, qui provoque le rire et, l’air de rien, tout à la fin, nous touche en douceur. Une musique parle de tout, des moments de joie comme de tristesse ; elle peut évoquer le passé, les erreurs, les regrets. Les moments sombres qui, d’une manière ou d’une autre, nous ramèneront à ce qui nous rend humains, sans pour autant nous enlever l’espoir. Et ça, Playlist le retranscrit bien.
Retrouvez Aline Bonvin, Philippe Annoni et Jérémie Nicolet sur leurs réseaux.
Le résumé donné par Friscènes, c’est ici.
Il n’y a pas de prochaine date connue pour ce spectacle. L’actualité des comédiens et la poursuite de ce spectacle est à suivre.
Amélie Gyger

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